Rétroaction et questionnement
Les propos tenus par l’orthopédagogue en situation d’intervention ont une importance cruciale. Ceux-ci peuvent notamment prendre la forme de rétroactions ou de questionnements adressés aux élèves.
La rétroaction
C’est quoi?
La rétroaction est l’information qui aide l’élève à améliorer sa performance et prendre conscience de ses capacités. Elle peut prendre trois formes:
1. Rétroaction verbale ou écrite par l'orthopédagogue. L’outil « Carnet de défis » peut être utile en ce sens.
2. Rétroaction par les pairs du sous-groupe de rééducation : un pair compare le travail de l’élève avec les critères attendus (à l’aide d’une grille d’évaluation, par exemple) et décrit les éléments qu’il juge réussis et ceux qui pourraient être améliorés (sous la forme de conseils, par exemple).
3. Autoévaluation (l’élève évalue lui-même ses propres progrès).
La rétroaction est l’une des stratégies qui a le plus d’impact sur la réussite (CTREQ, 2016; Education Endowment Foundation, s.d; Brookhart, 2010). De plus, il s’agit d’une pratique incontournable dans les interventions de palier 3 (Laplante et Turgeon, 2014).
La rétroaction, ce n'est pas :
- Indiquer à l'élève qu'il a 8 sur 10;
- Lui dire bravo;
- Lui dire de continuer ses efforts;
- Indiquer à l'élève qu'il a besoin de plus d'étude;
- Dire à l'élève que ses phrases ne sont pas bien écrites.
C'est plutôt :
- Informer l'élève de ses points forts, de ce qu'il a bien fait;
- Informer l'élève de ce qui a besoin d'être ajusté, amélioré;
- Proposer des moyens, faire des recommandations pour s'améliorer;
Ces trois éléments sont essentiels à une rétroaction de qualité.
Pourquoi en tenir compte dans ses interventions?
Le but de la rétroaction est de diminuer l’écart entre le point de départ des élèves et l’endroit où l’orthopédagogue veut les conduire. La rétroaction diminue cet écart en permettant aux élèves de savoir comment ils s’en sortent, mais aussi en leur indiquant comment ils peuvent s’améliorer.
Par ailleurs, le langage employé est un puissant outil pour influencer le sentiment d’efficacité personnel de l’élève et sa représentation de l’intelligence. Les rétroactions devraient donc mettre en évidence les stratégies pertinentes utilisées par les élèves et celles qui sont encore insuffisamment utilisées. Plus l’élève est conscient de ce qu’il fait bien et des éléments sur lesquels il doit mettre l’accent, plus il se donne du pouvoir sur sa réussite. Ce langage est également un outil privilégié pour entretenir des attentes élevées à l’égard des élèves. Bissonnette et coll. (2017) suggèrent de mentionner aux élèves que la réussite est possible s’ils fournissent les efforts nécessaires et s’ils utilisent les stratégies appropriées.
Quand intervenir sur la rétroaction?
La rétroaction doit être continue en rééducation de palier 3 et particulièrement intense lorsque l’élève est en pratique guidée. L’outil « Consignation des rétroactions » peut soutenir l’orthopédagogue en ce sens.
Comment faire?
Rappeler les cibles de rééducation aux élèves devrait faire partie de la routine quotidienne. C’est une simple action qui, en soi, stimule la performance des élèves. Jointe à une rétroaction centrée sur l’objectif, cela soutient encore plus les performances.
Une bonne rétroaction répond à trois caractéristiques. Elle est d'abord explicite, donc claire et sans ambiguïté. De plus, elle doit être personnalisée pour que l'élève se reconnaisse comme étant visé par la rétroaction. Finalement, elle doit être descriptive, c'est-à-dire qu'elle doit décrire le comportement apprécié. La rétroaction est encore plus valable si les attentes ont été préalablement nommées, donc, directement liée à ce qui est modélisé en enseignement explicite.
La rétroaction devrait répondre à trois questions du point de vue de l'apprenant :
1 - Où dois-je me rendre? Quels sont les objectifs?
2 - Comment y parvenir? Quels progrès ont été réalisés par rapport à l’objectif?
3 - Quelle est la prochaine étape? Quelles activités doivent être entreprises ensuite?
Il est important que la rétroaction indique à l'élève le lien entre le résultat obtenu et sa démarche.
Exemple: Tu es arrivé à bien lire ce mot nouveau en faisant le bruit de chaque lettre. Bravo! Maintenant, relis-le plus rapidement pour bien identifier de quel mot il s'agit.
L'outil « Des exemples de rétroaction de qualité » présente plusieurs exemples de rétroactions bien formulées en lien avec des cibles qui touchent aux processus spécifiques d'identification et de production de mots.
À ne pas faire :
- Interrompre l’élève qui est en train de travailler de façon autonome et adéquate;
- Diriger la rétroaction sur l'élève lui-même;
- Surcharger l'élève avec trop de rétroactions en même temps;
- Comparer les élèves entre eux;
- Dire aux élèves ce qui ne va pas sans leur donner de pistes pour s'améliorer.
À faire :
- Être clair sur ce qu’on veut que les élèves réussissent, connaissent et accomplissent;
- Préciser la rétroaction sur ce que chaque élève a appris, fait et réussi;
- Commenter seulement quelques éléments à la fois;
- Comparer les élèves à l’aide des critères préétablis qui démontrent le progrès;
- Dire aux élèves ce qu’ils ont fait et comment faire pour s’améliorer.
Et la rétroaction des pairs ?
Les pairs peuvent se donner spontanément beaucoup de rétroaction entre eux. Celle-ci peut toutefois être erronée. Gan (dans Hattie, 2017) suggère d’utiliser des incitations pour diriger la rétroaction des pairs. Il s’agit de questions ou d’amorces de phrases qui agissent comme des activateurs.
Outils
Les outils suivants peuvent être utilisés pour guider la pratique orthopédagogique.
Des exemples de rétroaction de qualité en orthopédagogie
Le questionnement
C’est quoi?
Il s’agit d’une série de questions qui favorisent les échanges entre l’orthopédagogue et les élèves, ou entre les élèves eux-mêmes. Le questionnement sert à amener les élèves à préciser leur raisonnement, et non à leur donner de l’information (Gouvernement de l’Ontario, 2011).
Quand intervenir sur le questionnement?
Le questionnement a sa place tout au long de la démarche d’apprentissage. L’intention des questions variera selon le moment où l’orthopédagogue les utilise. À la phase de préparation, le questionnement permet aux élèves d’activer leurs connaissances antérieures et se préparer à faire un nouvel apprentissage. Au cours de la phase de réalisation, le questionnement permet aux élèves de clarifier leur raisonnement. En écoutant les réponses des élèves, l’orthopédagogue a également accès à de l’information privilégiée pour éventuellement ajuster la planification de la rééducation. Au moment de la phase d’intégration, le questionnement permet aux élèves de résumer ce qu’ils ont appris, mettre à profit leurs habiletés métacognitives et faire des liens propices au transfert (Gouvernement de l’Ontario, 2011).
Pourquoi s'en préoccuper?
Par le questionnement, l’orthopédagogue peut recueillir de l’information et ajuster ses interventions. L’élève, lui, prend conscience de ses actions mentales grâce au questionnement. Plus l’élève est sollicité, plus il est concentré à la tâche et a des opportunités de se rappeler, organiser et traiter l’information afin de répondre aux questions (Commission scolaire des Draveurs, 2015).
Comment faire?
- Planifier des questions de qualité, mais exploiter aussi spontanément des moments d’échange pour questionner.
- Poser des questions ouvertes. Ces questions devraient être de différents niveaux cognitifs afin de faciliter l’activité mentale de l’apprenant (Commission scolaire des Draveurs, 2015) : questions de bas niveau (nomme…, connais-tu…?) et de haut niveau (explique… résume…). Utiliser des verbes comme créer, analyser, élaborer, évaluer et justifier pour inciter les élèves à développer leur raisonnement (Gouvernement de l’Ontario, 2011).
- Transmettre peu d’information à la fois pour ensuite poser des questions. Selon Gauthier, Bissonnette et Richard (2013), le modèle "Information-Question-Réponse" est plus efficace qu’une séquence d’informations terminées par des questions.
- Prévoir des questions qui valent la peine d’être posées (Hattie, 2017). En effet, les enseignants posent majoritairement des questions auxquelles ils connaissent déjà la réponse. Hattie (2017) suggère plutôt de prévoir des questions qui initient une véritable discussion sur les apprentissages. Il rappelle également qu’un enseignant devrait répartir son temps de façon équilibrée entre parler, écouter et agir.
- Exploiter différentes stratégies pour susciter les réponses des élèves, telles que les réponses orales (à l'unisson, partagées entre deux coéquipiers, en équipe ou individuellement), les réponses écrites (p. ex. : sur une ardoise individuelle ou par sondage électronique) ou les réponses d'action (p. ex. : pouce vers le haut ou vers le bas).
- Laisser un temps de réflexion suffisant, une fois la question posée (au moins 3 secondes). Les réponses des élèves gagneront en quantité et en qualité (Gouvernement de l’Ontario).
- Amener les élèves à développer eux aussi leur habileté à être de bons questionneurs. Leur pensée critique et leurs habiletés métacognitives y gagneront (Koechlin et Zwann, 2010).
Outils
Sources :
Appy, F. (2014). Comment fournir la rétroaction efficace aux élèves: guide avancé. Répéré à http://www.formapex.com/telechargementpublic/appyf2014a.pdf
Bissonnette, S. (2017). Gestion efficace des comportements en classe et dans l'école à l'aide du soutien au comportement positif. Repéré à https://drive.google.com/file/d/0B9acqT9DN0pjajNyYjE3NXNfbUU/view
Bissonnette, S., Gauthier, C. et Castonguay, M. (2017). L'enseignement explicite des comportements: pour une gestion efficace des élèves de la classe et dans l'école, Montréal, Chenelière.
Brookhart, S. (2010). La rétroaction efficace: des stratégies pour soutenir les élèves dans leur apprentissage, Montréal, Chenelière.
Commission scolaire des Draveurs (2015). Questionnement: gestion des apprentissages, Service des ressources éducatives.
CTREQ (2023). Les essentiels de la rétroaction constructive. Repéré à https://rire.ctreq.qc.ca/reali...
CTREQ (2016). Comment et pourquoi donner des rétroactions aux élèves. Repéré à http://rire.ctreq.qc.ca/2016/0...
Education Endowment Foundation (s.d). Teaching and Learning Toolkit: an Accessible Summary of the International Evidence of Teaching 5-16 Years old. Repéré à https://educationendowmentfoun...
Gauthier, C., Bissonnette, S. et Richard, M. (2013). Enseignement explicite et réussite des élèves: la gestion des apprentissages. Saint-Laurent, Québec: Éditions du Renouveau Pédagogique.
Gouvernement de l’Ontario (2011). L’art de questionner de façon efficace. Accroître la capacité: série d'apprentissage professionnels. 21. Repéré sur https://assets.ctfassets.net/c...
Guérin, Renée (2017, octobre). La rétroaction: une pratique pour appuyer l'intervention orthopédagogique. Communication présentée au Congrès de l’Association des orthopédagogues du Québec, Laval, Canada.
Hattie, J. (2017). L'apprentissage visible pour les enseignants: connaître son impact pour maximiser le rendement des élèves, Québec, Presses de l’Université du Québec.
Koechlin, C. et Zwaan, S. (2010). Des questions pour apprendre: enseigner aux élèves à se poser des questions et à utiliser adéquatement les réponses, Montréal, Chenelière Éducation.
Laplante, L. et Turgeon, J. (2014, octobre). L’intensification des interventions et le rôle des orthopédagogues [communication orale]. 2e symposium sur la Réponse à l'Intervention, Colloque de l'Association des Orthopédagogues.
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